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Photo du rédacteurJacqueline Ripart

« Habiter » dedans / dehors


Si, dans la pensée du philosophe allemand Martin Heidegger, « habiter » signifie « être-présent-au-monde-et-à-autrui », on peut se permettre de questionner le sens du terme « présence ».


Il est étonnant de voir que, dans le dictionnaire, la « présence » est un fait : le fait de se trouver dans un lieu, à proximité de quelqu’un ou de quelque chose, le simple fait d’être présent et d’exister. Or, la présence n’est-elle pas une action plutôt qu’un fait ? La présence n’engage-t-elle pas des interactions ? Un être vivant n’est-il pas en permanence en interaction avec son environnement, dont il dépend selon un réseau d’échanges d’énergie, d’information et de matière (imaginons ne serait-ce que l’air qu’il respire !) ?


Pour tenter de mieux comprendre cette présence au monde et à autrui – présence de l’être vivant en lui-même et non comme il nous apparaît – mettons un instant la focale sur l’infiniment petit, la cellule, unité fondamentale, structurale et fonctionnelle des organismes vivants. Puis sur plus petit encore, l’atome, composant élémentaire de la matière.

* Un écosystème étant défini comme un ensemble formé par une communauté d’êtres vivants en interaction avec leur environnement (biotope), au sein duquel ils développent un réseau de dépendance, d’échange d’énergie, d’information et de matière.


Selon ce cheminement, la matière serait considérée comme un processus dynamique dont la vie est l‘une des manifestations (la vie serait alors un processus, une organisation de la matière). Et la cellule survivrait grâce à un échange permanent de matière et d’énergie, selon un processus interne de régulation.


Pour rappel : la cellule est entourée d’une membrane qui, d‘une part lui donne sa forme, et d’autre part sépare son milieu intérieur du milieu extérieur - cette membrane perméable, ou semi-perméable, contrôle absolument tout ce qui entre et sort de la cellule.


C’est là que se trouve le fondement même de la signification de l’homéostasie, défini pour la première fois par Claude Bernard (médecin, physiologiste et épistémologue français), en 1865, dans son Introduction à l'étude de la médecine expérimentale, comme suit :

« L’homéostasie est la capacité que peut avoir un système quelconque à conserver son équilibre de fonctionnement en dépit des contraintes qui lui sont extérieures… Tous les mécanismes vitaux, quelque variés qu'ils soient, n'ont toujours qu'un but, celui de maintenir l'unité des conditions de la vie dans le milieu intérieur. »


Depuis lors, l’homéostasie fascine non seulement de nombreux chercheurs en biologie et en sciences sociales, qui tentent de mieux comprendre ce mécanisme basé sur l’équilibre et l’adaptation, mais aussi certains philosophes comme Roland Schaer (philosophe du vivant, agrégé de philosophie en 1971) ; ce dernier, en réintroduisant l’importance du vivant dans la notion même d’habiter, s’inspire du concept biologique d’« homéostasie » .


C’est ainsi que Roland Schaer définit l’importance de la constitution de ce « milieu intérieur », autoproduit et régulé par l’organisme :

« Un être vivant doit constamment échanger avec son milieu. Il survit de ses entrées et sorties de matières d’information qui peuvent aussi déclencher sa mort. […] Dans ce mécanisme métabolique se fabriquent deux milieux : le milieu intérieur – avec des paramètres relativement stables – et le milieu extérieur – où les paramètres fluctuent. Le milieu intérieur, ce premier endroit où nous habitons, grâce auquel nous habitons tous les autres, c’est notre corps. […] Les habits, c’est un habitat qu’on transporte avec soi. Très vite, ça a été une parure, une manière de créer un lien social, une façon de séduire… ».


Pour alimenter cette réflexion, voici une citation de Lucien Cuénot (1866-1951), biologiste et généticien français, théoricien de l’évolution :

« Il n’y a rien de vivant dans une cellule sauf l’ensemble. »



Ce texte résume la présentation de J. Ripart, lors de la réunion en visio-conférence du groupe Trobienphilo, le 14 février.


Par Jacqueline Ripart - 26 février 2022




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